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Histoire d’Avesnes-le-Comte de M. Philippe LEDRU

- 1878 -

( Sapeurs-Pompiers - pages 16 à 21 )

En 1847, M. LECHON groupant autour de lui quelques hommes intelligents et dévoués parvint à recruter un belle compagnie de sapeurs-pompiers; corps utile et qui mit maintes fois, depuis sa création, toute son énergie et tout son zèle au service du pays et qui se signala un grand nombre de fois en luttant contre un ennemi redoutable, l’incendie.

Si haut que l’on peut remonter dans nos annales, une triste et malheureuse célébrité s’est attachée à Avesnes et il n’est pas oiseux de jeter un coup d’oeil sur des désastres qui méritent d’occuper une place dans notre histoire.

Autrefois les torches incendiaires suivaient les armées et les nombreux faits de guerre survenus à Avesnes y ont souvent porté la dévastation.

En 1448, le dernier mercredi de Juillet, pendant que les habitants étaient aux champs pour leurs récoltes, soixante treize maisons avec leurs dépendances étaient livrées aux flammes.

Le Duc de Bourgogne PHILIPPE-le-BON fit remise à Avesnes de tous impôts pendant dix ans et accorda six cents chênes de choix pour aider à la reconstruction.

Un autre incendie causé par la malveillance vint affliger Avesnes en 1468. Les comptes de cette année et de l’année suivante nous donnent la mesure de la désolation qui en fut la conséquence : " Dons et rémissions aux manans et habitants de la ville d’Avesnes-le-Comte qui ont eu leurs maisons et démourances arses et leurs biens perdus au feu de meschief survenu en ladite ville, le 25ème jour d’Avril 1468, Mondit Seigneur le Duc ayant pitié desdits habitants, afin qu’ils aient cause et meilleur corage d’eulx aidier à ramaser et démourer en la dite ville sans délaisser et habandonner icelle n’y leurs manoirs, terres et héritaiges en ruyne, leur a de sa grace espécial accordé que pour le temps, terme et espace de dix ans commenchans le 27 ème jour d’Avril en 1468, ilz soient et demeurent quittes et paisibles des rentes fonsiaires qu’ilz doivent à mondit Seigneur, tant à cause de leurs manoirs brullez comme de leurs aultres terres et héritaiges qu’ilz ont en ladite ville d’Avesnes ; aussi de leur part et porcion des tailles et aides ordinaires et extraordinaires accordées et à accorder en la Conté d’Artois " .

Cinquante trois familles ont joui de la remise des rentes parmi lesquels figure Antoine de Rochebaron. Elles avaient eu leurs manoirs ars et brulez.

< Ausdis habitants cinquante quesnes au bois d’Avesnes appartenant à Mgr le Duc, oultre et pardessus les trois cents quesnes desdis bois que mondit Seigneur leur a ordonné prendre et avoir de lui en l’année précédente de ce compte par ses lettres. Données à Bruges, le 20 de May 1468. >

De nouveaux incendies eurent lieu dans les guerres en 1474, 1512, 1520, 1521, 1538. La ville et le château ne présentaient alors que des ruines.

En 1553, au moment de la prise de la forterese par les Français, tout ce qui restait debout fût livré aux flammes. Le retour fréquent de ces sinistres ne permettait pas aux habitants de relever des demeures somptueuses. Des constructions modestes érigées avec le bois, l’argile et le chaume suffisaient aux nécessités de ces temps lamentables.

En 1636, la prise du château fut suivie d’un incendie général, le feu fut mis aux quatre coins de la ville. L’église seule resta debout.

Vingt six maisons furent brûlées en 1715.

Le lundi 24 Septembre 1731, deux cent quarante quatre maisons, le château et le presbytère furent détruits par accident. Il parait que le feu s’était déclaré au voisinage d’une maison dans le grenier de laquelle était suspendu un baril de poudre. L’impossibilité de sauver ce baril et la rapidité de l’incendie firent qu’en peu d’instants l’explosion eut lieu et que tous les quartiers furent de suite couverts de brandons enflammés. Les toits étaient généralement de chaume, aussi la destruction fut-elle énorme.

En 1789, tout le quartier bas d’Avesnes fut attaqué par les flammes ; une femme périt sous les décombres de sa maison.

La nuit du 22 au 23 Avril 1790, toute la partie haute d’Avesnes fut le théâtre d’un incendie considérable. Plus de la moité du bourg était en flammes. La lueur était si vive et si intense, que les moines de l’abbaye de Saint-Eloi purent réciter au dehors leurs offices de la nuit.

On avait épuisé toute énergie pour limiter la marche du fléau et le vent qui soufflait du nord-est faisait avancer l’incendie avec rapidité et semblait ne devoir s’arrêter que quand il n’aurait plus trouvé d’aliment En effet, rien ne pouvait échapper. Les habitants au désespoir courent au presbytère et supplient leur vieux doyen de venir avec le Saint-Sacrement de- mander à un Dieu au pied des maisons embrasées l’intervention de toute sa puissance. C’était tenter Dieu. Aussi fallut-il les plus énergiques instances pour vaincre les hésitations du pieux vieillard. Plusieurs seigneurs du voisinage joignaient leurs supplications à celles des habitants. "De grâce, allez-y, Monsieur le Doyen, cela s’est déjà vu". M. COCHET finit par céder, à la foi vive de tant de monde, et peu d’instants après, il arrivait processionnellement au lieu du désastre, psalmodiant le chant de détresse : Miserere mei, Deus !

Les travaux avaient cessé, la foule s’était prosternée, les sanglots, les cris "Pitié, Miséricorde !" étaient dans toutes les bouches. Le saint vieillard élève le Saint-Sacrement, bénit le peuple et à l’instant, une effroyable colonne de fumée monte, monte et recule contre le vent. (1).

Les lois physiques paraissent avoir subi dans ces circonstances quelques dérogations peu ordinaires. Telle a été du moins l’opinion universelle. Quelques autres incendies sont venus clore le dix-huitième siècle et à quatre époques différentes, une quinzaine de maisons et beaucoup de bâtiments de ferme disparurent. (2)

Le dix-neuvième siècle a fourni également son contingent de sinistres. Plus de dix incendies, dont plusieurs considérables ont eu lieu. L’avenir ne produira plus sans doute les mêmes malheurs. Toutes les maisons et autres édifices ont eu leurs toits de chaume remplacés par des toitures incombustibles et le service des pompes amoindrirait assurément les désastres.

La nuit du 2 au 3 Mai 1850, un incendie survenu dans la rue des Carrières et dans celles avoisinantes détruisit onze maisons et une quarantaine de granges et remises d’une valeur de plus de 50.000 francs. Un comité de secours, immédiatement organisé par les notables habitants, recueillit plus de douze mille francs à Avesnes et aux alentours. Toutes les maisons furent relevées aux frais du Comité et dans de meilleures conditions qu’avant le sinistre.

(1) Trente ans ne s’étaient pas écoulés depuis le miracle que je l’entendais raconter par tout Avesnes. Jamais personne n’en a plaisanté, jamais personne ne l’a contesté.

M. le doyen LEFIN a recueilli en 1854 une foule de témoignages de personnes qui avait assisté à l’incendie et qui ont signé leurs déclarations.

Plusieurs protestants présents cessèrent de repousser le dogme de la présence réelle et se convertirent.

On s’extasiait le lendemain de voir les substances les plus inflammables arrêtées brusquement dans leur combustion. Dans les rayons d’une boutique, beaucoup d’allumettes avaient brûlé juqu’à leur milieu.

(2) L’incendie de 1789 et celui de 1790 avaient causé un dommage évalué à plus de 320.000 livres.

La Convention Nationale accorda un secours de 31.980 livres aux incendiés d’Avesnes-le-Comte. Le décret est du 8 Septembre 1792. Quarante habitants frappés par les sinistres ds 15 et 16 Juin 1789 prirent part à l’indemnité et recurent 10.000 livres.

Cent douze victimes de l’incendie des 22 et 23 Avril 1790 reçurent la somme de 20.410 livres.Le sini sinistre de 23 Septembre 1790 causa une perte de 5.100 livres. L’indemnité de la Convention fut de 510 livres.

 
 
 
 
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